2018 – Anna Greipl

Le Prix Henry Dunant – Recherche 2018 est décerné à Mme Anna Greipl pour son mémoire de LLM ‘International State Responsibility: The Role of Italy in Outsourcing Migration Management to Libya’  (« Responsabilité internationale de l’État : le rôle de l’Italie en sous-traitant la gestion des flux migratoires à la Libye »).

Ce mémoire traite de la responsabilité de l’État dans la gestion des flux migratoires en examinant le rôle et la responsabilité de l’Italie, notamment au titre du « Memorandum of Understanding » conclu en 2017 par l’Italie et la Libye, en vue de conférer à cette dernière l’autorité et la gestion des contrôles aux frontières dans le but de réduire les flux migratoires vers l’Europe.

« Hormis le fait que ce mémoire est extrêmement bien documenté et rédigé, il traite d’un problème contemporain qui affecte des milliers de personnes parmi les plus vulnérables dans notre monde contemporain » souligne le professeur Marco Sassòli.  « Il répond donc aux objectifs du Prix, à savoir d’approfondir, de renforcer et de renouveler les engagements et les idéaux d’Henry Dunant ».

Résumé du Mémoire

Ce mémoire traite de la responsabilité internationale de l’État qui délègue à un autre État la responsabilité de la gestion des flux migratoires vers son territoire.  Il présente une analyse en profondeur du rôle et des responsabilités de l’Italie, à la lumière du « Memorandum of Understanding (MoU) » conclu en 2017 par l’Italie et la Libye ; cet instrument donne en effet à cette dernière l’autorité de gérer les contrôles aux frontières afin de réduire les flux migratoires vers l’Europe.  Le mémoire démontre que tout en éliminant le contact territorial ou physique entre les réfugiés et migrants, d’une part, et ses autorités, de l’autre, l’Italie ne peut pour autant s’exonérer de sa responsabilité pour les violations des droits humains dont les réfugiés et migrants sont victimes en Lybie.

Pour traiter ce sujet, le mémoire commence par analyser la situation des réfugiés et migrants en Lybie au regard des droits de l’homme et du droit des réfugiés. Il examine ensuite la nature et l’étendue du MoU qui définit la coopération entre les autorités italiennes et les autorités libyennes concernant la restriction d’accès des réfugiés et migrants à l’Europe.  Ce MoU constitue la base de la politique migratoire Italo-libyenne et permet de déterminer le degré d’assistance que l’Italie apporte à la Lybie.  Enfin, le mémoire analyse l’implication juridique directe que les mesures de contrôle aux frontières établies par le MoU ont sur les droits des réfugiés et migrants en Lybie.  Il conclut que les opérations libyennes en vue d’empêcher les réfugiés et migrants de quitter le territoire libyen pour parvenir sur le territoire italien et être au bénéfice de la législation italienne sont, de par leur nature, des entraves aux droits humains essentiels des migrants et des réfugiés.

D’un côté, les traités internationaux sur les droits humains obligent les États qui y sont parties à ne pas contribuer à la violation des droits humains.  Mais d’un autre côté, l’état actuel de la législation crée un obstacle insurmontable à l’extension du champ d’application des traités sur les droits humains à des cas où le contrôle effectif sur le territoire ou la personne peut être établi.  La dernière partie du mémoire examine l’Article 16 des « Draft Articles on Responsibility of States for Internationally Wrongful Acts (ASR) – Projets d’articles sur la responsabilité des Etats pour des actes internationalement illicites » comme une possibilité alternative de tenir un État responsable au titre de l’aide et de l’assistance qu’il offre à un autre État qui commet des violations des droits humains.  A la lumière de l’article 16 ASR, le mémoire conclut que l’Italie pourrait être indirectement responsable des violations des droits humains dont les réfugiés et migrants sont victimes en Libye au titre de l’aide et de l’assistance que l’Italie donne aux autorités libyennes.

Au vu de la tendance actuelle à déléguer de plus en plus la gestion des flux migratoires à des pays tiers, l’auteur conclut en insistant sur l’importance de discuter les avenues par lesquelles un État peut être tenu responsable de l’aide et de l’assistance qu’il offre à un autre État.  Non seulement pour empêcher un État de ses soustraire à ses obligations au titre des droits humains, mais aussi pour assurer une protection effective des personnes dont les droits humains ont été violés.

Biographie

Anna Greipl est titulaire d’un Bachelor en Relations Internationales de l’Université de Genève et d’un Master in Law and Politics of International Security de l’Université Libre d’Amsterdam («  Vrije Universiteit »).  Ayant manifesté un intérêt particulier pour le droit international humanitaire et les droits de l’homme, elle a choisi de suivre le programme de LL.M à la « Geneva Academy » et l’a complété en été 2018.  Précédemment elle avait travaillé pour la « Deutsche Gesellschaft für Internationale Zusammenarbeit (GIZ) » dans le cadre des activités de réforme de la sécurité au Cameroun.  Elle travaille actuellement comme juriste auprès de la division juridique du Comité International de la Croix Rouge.

Lire le mémoire (en anglais)

Lien au site de l’Académie de Genève (en anglais)